La matrescence,
un voyage vers la parentalité
La matrescence, une révolution dans la vie des femmes
La matrescence, concept encore méconnu dans de nombreuses cultures, désigne cette transition complexe, multidimensionnelle, qu'une femme traverse en devenant mère. Néologisme issu de la contraction des mots « maternité » et « adolescence », le terme évoque une période de transformation profonde, à la fois biologique, psychologique, sociale et identitaire. Popularisée par l'anthropologue Dana Raphael dans les années 1970 et revisitée récemment par la psychiatre Alexandra Sacks, la matrescence est souvent comparée à l'adolescence : une phase où les bouleversements internes s'entrelacent avec les attentes externes de la société.
La matrescence, un voyage biologique
Dès la conception, le corps de la femme commence une métamorphose orchestrée par une symphonie d'hormones. L'augmentation de la progestérone, des œstrogènes et de l'ocytocine ne se limite pas à la préparation physique pour porter et nourrir un enfant. Ces hormones affectent également l'humeur, les émotions et les processus cognitifs.
L'ocytocine, surnommée "l'hormone de l'amour", joue un rôle crucial dans le lien mère-enfant, en favorisant l'attachement et la confiance. Cependant, les fluctuations hormonales peuvent également provoquer des sentiments d'irritabilité, d'anxiété ou de confusion, semblables à ceux vécus pendant l'adolescence. Ce cocktail chimique rend la matrescence particulièrement intense, parfois déstabilisante.
La quête identitaire : qui suis-je devenu ?
Au-delà des transformations physiques, la matrescence engendre une reconfiguration identitaire. Avant la maternité, la femme s'identifie souvent par ses relations, sa carrière ou ses passions. La venue d'un enfant bouleverse cet équilibre, car le rôle de la mère devient central, souvent au détriment d'autres facettes de son identité.
Cette tension peut mener à des interrogations existentielles :
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Suis-je toujours la même personne qu'avant ?
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Où s'arrête "moi" et où commence "maman" ?
La société, souvent prompte à glorifier l'instinct maternel (qui n'existe pas d'ailleurs), attend des mères qu'elles se dévouent entièrement à leur enfant, ce qui peut exacerber le sentiment de perte de soi. Pour beaucoup, il s'agit d'un combat pour retrouver un équilibre entre la femme et la mère. L'identité de femme se perd surtout les premiers mois et c'est normal. Cette période doit être transitoire. Si cela devient trop omniprésent un accompagnement avec un professionnel est conseillé.
Les bouleversements sociaux : le rôle de la matrescence dans le tissu culturel
La maternité est inévitablement inscrite dans un contexte culturel. En Occident, où l'individualisme est valorisé, la pression pour être une "super maman" indépendante est écrasante. Les femmes doivent souvent jongler entre les responsabilités familiales, professionnelles et sociales, tout en maintenant une image d'équilibre parfait. Cette pression engendre des difficultés à gérer ses émotions et son stress.
Dans d'autres cultures, où les structures familiales élargies jouent un rôle central, les nouvelles mères peuvent bénéficier d'un soutien collectif, mais cela s'accompagne aussi d'attentes culturelles spécifiques. Par exemple, dans certains pays, la période post-partum est ritualisée, les mères étant souvent entourées et soutenues par leur communauté pendant plusieurs semaines après la naissance, en Asie, cela s'appelle le mois d'or.
Ces différences montrent que la matrescence ne peut être comprise sans tenir compte des cadres sociaux et des normes culturelles qui influencent la manière dont une femme vit cette transition.
Les défis émotionnels : entre joies et ambiguïtés
La matrescence est souvent associée à une dualité émotionnelle. La joie intense de donner la vie coexiste avec des sentiments plus sombres : la fatigue, la culpabilité, l'anxiété, le burnout parental, voire la dépression post-partum. Ces émotions complexes sont souvent passées sous silence, car elles ne correspondent pas à l'image idéale de la maternité.
La culpabilité maternelle est un phénomène particulièrement répandu. Les mères ressentent fréquemment qu'elles n'en font jamais assez, ou qu'elles ne répondent pas parfaitement aux besoins de leur enfant. Ces sentiments sont amplifiés par les réseaux sociaux, où les images de maternité idéalisée abondent, créant une pression supplémentaire.
La société joue un rôle central dans ce silence émotionnel. En glorifiant les sacrifices maternels et en minimisant les luttes, elle empêche les femmes d'exprimer librement leurs sentiments, renforçant l'isolement émotionnel. De plus, la prévention d'accompagner les futurs et jeunes parents dans la communication avec un nourrisson et dans se processus de parentalité n'existe quasiment pas. La sage-femme ou la gynécologue peuvent vous donner quelques conseils mais il n'y pas d'accompagnement spécifique. C'est pour cela que je propose des thématiques autour de la parentalité et du post-partum.
La matrescence comme levier de transformation
Pourtant, la matrescence n'est pas seulement une période de bouleversements ; elle peut aussi être un catalyseur de développement personnelle. Nombreuses sont les mères qui rapportent un sentiment de résilience renforcé, une capacité accumulée à gérer le stress et un sens plus profond des priorités après cette transition.
Par exemple, l'expérience de la maternité pousse souvent les femmes à développer ou améliorer de nouvelles compétences, comme l'organisation, l'empathie et la résolution de problèmes. Ces qualités, bien que souvent sous-estimées, sont précieuses non seulement dans la vie personnelle, mais aussi dans la sphère professionnelle.
La matrescence peut également devenir un moment de redéfinition des objectifs de vie. Certaines femmes décident de réorienter leur carrière ou de se lancer dans des projets qui leur tiennent à cœur, inspirées par le désir de donner un exemple à leur enfant ou de construire un monde meilleur pour eux.
Les limites du systèmes médicales face à la matrescence
Malgré son importance, la matrescence reste largement ignorée par le système médical. Les consultations postnatales se concentrent souvent sur le bien-être physique de la mère et du bébé, en négligeant les aspects émotionnels et identitaires de la transition.
Cette lacune est particulièrement problématique, car de nombreuses femmes hésitent à parler de leurs difficultés par crainte d'être jugées ou mal comprises. Les professionnels de santé ne sont pas toujours formés pour détecter les signaux de détresse psychologique, laissant les mères se débrouiller seules.
Cependant, des initiatives récentes cherchent à combler ce vide. Des programmes de soutien psychologique, des groupes de parole pour les jeunes mères et des campagnes de sensibilisation commencent à émerger, permettant aux femmes de mieux comprendre et traverser leur matrescence.
Vers une reconnaissance de la matrescence
Pour normaliser la matrescence, il est essentiel de briser les tabous qui entourent la maternité. Cela passe par une éducation plus large sur les réalités de cette transition, dès les cours de préparation à l'accouchement. Les femmes devraient être informées non seulement des défis physiques de la maternité, mais aussi des changements émotionnels et identitaires qu'elles pourraient rencontrer. Devenir mère c'est aussi un travail d'équipe avec le papa qui peut vivre aussi sa patrescence.
Les médias et les réseaux sociaux jouent également un rôle clé. En montrant des récits diversifiés et honnêtes sur la maternité, ils peuvent aider à déconstruire les mythes autour de la « mère parfaite » et créer un espace de solidarité entre les femmes.
Enfin, les politiques publiques doivent évoluer pour soutenir les mères. Cela inclut des congés parentaux prolongés, un accès accru aux services de santé mentale, et des initiatives pour sensibiliser les employeurs aux besoins des femmes en matrescence. Un travail en prévention de tout ses maux du post-partum permettrait une meilleur relation avec son bébé et d'accompagner les parents et les couples dans cette période qui sont de véritable montagnes russes.
La matrescence est une période complexe mais profondément humaine, marquée par des bouleversements biologiques, émotionnels et sociaux. Longtemps occultée par une vision idéalisée de la maternité, elle commence à émerger comme un sujet central dans les discussions sur la parentalité et le bien-être des femmes.
Reconnaître et valoriser la matrescence, c'est offrir aux femmes un espace pour explorer leur identité, exprimer leurs émotions et trouver leur propre équilibre. C'est aussi un appel à la société pour qu'elle soutienne les mères non seulement dans leur rôle, mais aussi dans leur cheminement personnel. Car comprendre la matrescence, c'est finalement célébrer la force, la vulnérabilité et la résilience des femmes dans cette étape unique de leur vie. De plus cette étape permettrait aussi de valoriser l'aide du conjoint qui est indispensable pour une vie en famille heureuse.